Agathe Boulanger

A - Mes roues sont très fines, je tombe.

Gw - Les masses se mêlent, les commentateurs, confus, ne parviennent plus à reconnaître les coureurs, à dire qui est dans l’échappée.

A - Tout est recouvert de boue, les caméras, mon vélo, mon maillot, mon corps entier, j’ai enlevé mes lunettes de protection car je ne vois plus rien. La boue recouvre mon visage, mes paupières, on ne voit plus que mes yeux plissés qui tentent d’anticiper l’arrivée des prochains secteurs pavés.

Gr - Les commentateurices se relaient, meublent, parlent de la course en elle­-même : “Cette folie, ce mélange de modernité et d’archaïsme, c’est encore plus le cas aujourd’hui, avec ces conditions dantesques [...] le secteur est boueux, les pavés sont glissants, les chutes sont nombreuses, c’est une course par élimination, dans quel état vont-ils finir ? Ils ne seront pas nombreux à l’arrivée, c’est truffé de difficultés, il va falloir rester sur le vélo, c’est une course piégeuse, avec son lot d’incertitudes, un jeu d’équilibriste. On imagine toute la pression que les coureurs ont ressentie au moment de s’élancer aujourd’hui tellement les conditions sont difficiles, pour eux, ces guerriers, à qui l’enfer est promis. Ils savent très bien où ils vont. [...] La première course femme a eu lieu hier soir, une première historique! Les coureuses ont été admirables, remarquables. Entre l’excitation, la peur, et une grande concentration, elles nous ont fait vibrer. [...] Tout le monde sait à quoi s’attendre, mais personne ne sait quel sera le résultat. Alea jacta est, le sort en est jeté.

Gw - Je laisse mon vélo de côté et je continue à pied. Je garde le cap. Bosse, bosse, bosse, bosse, bosse, bosse, Il m’a dit, bosse, bosse, bosse, bosse, bosse, bosse ! Il veut me voir faire la sale, sale, sale, sale, sale, sale, sale. Alors je me mets au travail, travail, travail, travail, travail, travail...

A - Je pense aux parcours de randonnée de Grégoire qui cherche toujours à faire une boucle différente chaque jour. Il dit qu’il fait ça :